Torvalds défend cette décision et affirme que les “usines à trolls russes” ne le décourageront pas.
“Retirer certaines entrées en raison de diverses exigences de conformité. Elles peuvent revenir à l’avenir si une documentation suffisante est fournie.”
Ce commentaire de deux lignes, soumis par Greg Kroah-Hartman, l’un des principaux responsables du noyau Linux, accompagnait un correctif qui supprimait une douzaine de noms du fichier MAINTAINERS du noyau. “Certaines entrées” comportaient notamment des noms russes ou des adresses électroniques .ru. Les “diverses exigences de conformité” étaient, dans ce cas, des sanctions contre la Russie et les entreprises russes, suite à l’invasion de l’Ukraine par ce pays.
Cette fusion n’est pas passée inaperçue. Des réponses sur la liste de diffusion du noyau ont posé des questions sur ce correctif “très vague”. James Bottomley, développeur du noyau, a écrit que “nous” (parlant apparemment au nom des mainteneurs de Linux) avions reçu un “conseil réel” de la part des avocats de la Fondation Linux. Les employés des entreprises figurant sur la liste des Specially Designated Nationals and Blocked Persons (OFAC SDN) de l’Office of Foreign Assets Control du département du Trésor, ou liés à ces entreprises, verront leurs collaborations “soumises à des restrictions” et “ne pourront pas figurer dans le fichier MAINTAINERS”. Par “documentation suffisante”, on entend la preuve qu’une personne ne travaille pas pour une entité SDN de l’OFAC, a écrit M. Bottomley.
Il s’en est suivi un certain nombre de messages remettant en cause la légitimité, la soudaineté, la nature potentiellement forcée par les États-Unis et non révisée du commit, ainsi que des questions plus générales sur la séparation entre le code source ouvert et la politique internationale. Le créateur de Linux, Linus Torvalds, est entré dans le fil de discussion en déclarant : “Ok, beaucoup de trolls russes en liberté”. Il a écrit : “La raison pour laquelle ce changement a été effectué est tout à fait claire” et a noté que les “usines à trolls russes” ne reviendront pas dessus et que “les ‘diverses exigences de conformité’ ne sont pas seulement une affaire américaine”.
“Pour ce qui est de m’envoyer un correctif – veuillez utiliser la bouillie que vous appelez cervelle. Je suis Finlandais. Vous pensiez que je soutiendrais l’agression russe ? Apparemment, il ne s’agit pas seulement d’un manque d’informations réelles, mais aussi d’un manque de connaissances historiques”, a écrit Torvalds avant de signer. Plus tard, Torvalds a écrit qu’il n’entrerait pas dans les détails que les mainteneurs du noyau “ont été informés par des avocats” et qu’il ne commencerait pas “à discuter de questions juridiques avec des internautes au hasard”, qu’il soupçonne “d’être des acteurs payés et/ou d’avoir été excités par ces questions”.
Les noms ont été supprimés, le code demeure
La majorité de ceux qui ont été retirés du fichier des mainteneurs travaillent sur des pilotes pour le matériel d’Acer, de Cirrus et, notamment, de Baikal, un fabricant de puces sans usine qui a essayé de développer des CPU ARM de conception russe et qui a fait faillite en 2023. L’un des développeurs russes retirés, Serge Semin, dont le profil GitHub indique qu’il a travaillé pour l’entreprise technologique russe sanctionnée Baikal, a écrit une longue note d’adieu à la liste du noyau, se décrivant comme un “bénévole et un amateur”.
Les sanctions à l’encontre de la Russie et de ses entreprises se sont déjà heurtées à la maintenance du noyau Linux. L’année dernière, comme le rapporte le blog Phronix, des correctifs de Réseau soumis par des développeurs associés à Baikal ont été refusés par un mainteneur de sous-système, mais d’autres correctifs provenant de Baikal ont été acceptés en amont dans d’autres parties du noyau. Les sanctions américaines contre les entreprises technologiques russes ont eu un effet considérable sur l’économie russe dans son ensemble.
Pour l’instant, les contributions antérieures des codeurs russes retirés de la liste des mainteneurs restent dans le noyau. Ars a contacté la Fondation Linux pour obtenir des commentaires et mettra à jour ce billet avec sa réponse.
Jad MARCHI est un ardent défenseur de la technologie, passionné par son potentiel de transformation. Ayant accumulé une décennie d’expérience dans le secteur technologique, Jean a travaillé sur une variété de projets innovants qui l’ont amené à comprendre le paysage changeant de ce domaine. Il est fasciné par l’évolution rapide de la technologie et son impact sur notre société. Que ce soit l’intelligence artificielle, la robotique, la blockchain ou la cybersécurité, il est toujours à la recherche des dernières tendances. Ses articles cherchent à informer, à inspirer et à provoquer des réflexions sur la façon dont la technologie façonne notre avenir.